Moi Jeu Tri, les enfants acteurs d’une société plus propre

Créée en 2017, l’association Moi Jeu Tri a pour missions l’éducation à l’environnement et le développement de programmes socio-éducatifs en milieu scolaire. Elle est soutenue par la Fondation de la Mer depuis trois ans.

Réponses croisées de Paul Testard, Délégué général et d’Edem d’Almeida, Président

Comment est née l’idée de Moi Jeu Tri ?  

Avec la création d’Africa Global Recycling (AGR) pour la valorisation de déchets au Togo en 2013, nous nous sommes rendus compte de la nécessité de sensibiliser et d’éduquer au-delà du simple discours écologiste. Redéfinir profondément la notion de déchet, dans le contexte spécifique africain, s’est imposé naturellement.
En 2016, nous avons proposé aux écoles de bénéficier gratuitement de bacs de tri sélectifs et de développer avec nous des séances de sensibilisation pour les élèves. Et en 2017 l’association Moi Jeu Tri naissait officiellement.

Quels sont les objectifs et les missions de Moi Jeu Tri ?

Notre philosophie se résume à faire de l’école un maillon essentiel de la chaîne de valorisation des déchets ménagers, en faisant appel au rôle éducateur de l’enfant pour porter le changement dans les familles. Nous nous attelons à faire la démonstration qu’une bonne gestion de nos déchets a des impacts durables, mesurables qui touchent le développement des territoires et de leur capital humain. 

Pourquoi mettre l’enfant au centre de vos préoccupations ?

La transition écologique est un enjeu mondial qui se fait de plus en plus pressant. L’Afrique subit de plein fouet les changements climatiques alors même qu’elle contribue à moins de 4% des émissions de gaz à effet de serre. Or, les promesses de financements à hauteur de 100 milliards de dollars par an des pays riches vers les pays du sud ne sont pas tenues. Nous devons donc trouver d’autres leviers sans attendre ces financements : pour cela il n’y a pas mieux que l’éducation, dont Nelson Mandela disait qu’elle est “l’arme la plus puissante que l’on puisse utiliser pour changer le monde”.

Moi Jeu Tri est présent au Togo et en Côte d’Ivoire, pourquoi ces choix ?

Moi Jeu Tri a été fondé au Togo, comme un programme de l’entreprise Africa Global Recycling (AGR) dans le cadre de sa démarche de Responsabilité Sociale, puis comme association indépendante.

Nous développer à Abidjan nous a paru être la bonne deuxième étape dès 2020. Principal centre urbain, Abidjan concentre presque toutes les problématiques liées aux déchets et à l’assainissement.
A Abidjan, ce sont 50 kilos de déchets qui sont jetés chaque seconde ! L’urbanisation croissante, soutenue par une démographie dynamique, pèse sur les capacités des acteurs publics et pose de nombreuses problématiques. Jusqu’en 2018, la plupart des déchets ménagers étaient jetés dans les décharges à ciel ouvert. Pour l’année 2019, ce sont 6.354.000 tonnes de déchets qui ont été produits, dont un pourcentage très limité est recyclé. Les évaluations les plus optimistes estiment à 10% le taux de recyclage du plastique par exemple. 

Nos programmes ont été très bien accueillis et notre organisation a grandi vite en Côte d’Ivoire. Moi Jeu Tri compte aujourd’hui 27 collaborateurs sur l’ensemble des entités, présents dans 7 communes. 

 Quel est le lien de Moi Jeu Tri avec la mer ?

Le lien entre pollution plastique et la mer est malheureusement trop évident. 90% des déchets plastiques dans l’océan viennent de 10 fleuves des pays du Sud, dont plusieurs en Afrique. 

A Abidjan, ville que je connais bien, chaque année 75 000 tonnes de déchets se déversent dans les baies d’Abidjan, constitués de 55% de plastiques. Pas loin de 200 tonnes par jour en moyenne ! Il y a encore 15 ans, on faisait de la plongée dans une lagune totalement propre, aujourd’hui on ne peut plus naviguer sans heurter une bouteille qui flotte à chaque vague, et cela est vraiment triste. Ces histoires se répètent dans toutes les localités où nous travaillons, sur les plages du Togo ou de Côte d’Ivoire. 

Pourquoi ce partenariat avec la Fondation de la Mer ?

Nous connaissions le travail impressionnant de la Fondation de la Mer et nous avions exactement les mêmes objectifs au même moment ! Pour nous : développer des actions de sensibilisation et du contenu pédagogique autour de la protection des océans. Pour la Fondation de la Mer : la volonté de développer leurs actions dans les pays francophones, notamment en Afrique. Nous avons donc trouvé des synergies fortes autour de deux axes prioritaires :

  • Un travail sur la sensibilisation des populations, avec le programme « Un geste pour la Mer » ;
  • Un travail de conception d’outils pédagogiques qui s’est concrétisé par la réalisation d’un livret pédagogique appelé Ma Planète Bleue. Nous l’avons officialisé en juin dernier lors de la journée mondiale de l’Océan et nous avons commencé le déploiement de 10 000 livrets à la fin de l’année 2022. 

Quelles sont vos prochaines étapes ?

A partir de 2022, c’est un nouveau chapitre qui s’ouvre pour Moi Jeu Tri. L’atteinte de 100 000 bénéficiaires dans nos programmes représente un cap et une fierté mais c’est aussi la première marche d’une ambition beaucoup plus grande, celle d’atteindre 1 000 000 de bénéficiaires à l’horizon 2025. Cette ambition est réaliste et dépend de notre capacité à capitaliser sur les apprentissages, les succès et les échecs de ces premières années. Les efforts de structuration de l’organisation et la diversification des compétences de nos équipes en interne seront aussi de vrais leviers pour aller plus loin.  L’aventure de Moi Jeu Tri ne s’arrête pas au Togo et en Côte d’Ivoire puisque l’association a le projet de se déployer dans de nouveaux pays.