Article publié le 13/09/2022

40 ans après l’adoption de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, sommes-nous naïfs d’espérer la signature d’un traité international contraignant pour la protection de la biodiversité marine en haute mer ? La perspective d’un traité en 2022 est-elle en train de tomber à l’eau ?

La haute mer, désignée aussi par le terme « eaux internationales », commence au-delà des zones économiques exclusives des États, à maximum 200 milles nautiques (370 km) des côtes. Elle représente plus de 60% de la surface des océans et près de la moitié de la surface du globe, mais ne dispose aujourd’hui d’aucune protection spécifique. Ne s’y appliquent en effet que de rares règles concernant le sol et le sous-sol, gérés par l’Autorité internationale des fonds marins. Pour le reste, entre le fond et la surface, de nombreuses activités peuvent être menées très librement. Un accord permettant de créer des espaces protégés dans ces zones est donc essentiel, dans un monde où l’objectif “30 x 30” (30% des océans protégés en 2030) semble s'éloigner.

Les États membres de l’ONU se sont rassemblés pour la 4e session de la Conférence intergouvernementale “BBNJ”, du 15 au 26 août dernier à New York. L’objectif était de mettre un point final à 18 ans de travaux et d’accoucher enfin d’un traité sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. D’où le nom de traité “BBNJ” : Biodiversity Beyond National Jurisdiction, en français : biodiversité située au-delà des juridictions nationales. 

La proposition de texte s'axait autour de thèmes clés, convenus en 2011 :

  • Les ressources génétiques marines, y compris les questions sur le partage des avantages,
  • Les outils de gestion par zone (OGZ), y compris les zones marines protégées,
  • L’évaluation des incidences sur l'environnement (EIE),
  • Le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines.

Malgré des progrès dans les discussions, des dissensions subsistent, révélant une divergence entre les pays développés et les pays en développement. Ce qui a poussé le Président à suspendre le travail après deux semaines de négociation. 

Plusieurs sujets de contentieux n'ont pas permis d'entériner l'objectif “30 x 30”. En effet, la volonté de créer des aires marines protégées implique une définition claire des zones internationales et de la délégation de leur gestion, ce qui n’a pas encore été statué. 

Parmi les désaccords, on peut notamment citer le point des ressources génétiques marines. Si elles sont considérées comme faisant partie de l’héritage commun de l’humanité, les pays en développement s’inquiètent du financement des recherches et de la mise en place d’un partage juste et équitable des avantages issus de leur utilisation. 

Bien que les membres s’accordent sur les progrès effectués lors de cette conférence, certains, comme les petits états insulaires en développement, déplorent l’absence de concrétisation de ce traité face à l’urgence de la situation climatique. Ils demandent l’organisation rapide d’une nouvelle session, si possible avant 2023. Ces questions d'équité Nord-Sud traversent de nombreuses négociations internationales, en particulier celles sur le climat où les pays en développement victimes mais pas responsables du réchauffement réclament en vain aux pays riches de respecter leurs promesses d'aide financière.

La France doit désormais peser du poids de ses 11 millions de km2 d’espace maritime, avec l’Union Européenne, pour permettre que l’année 2023 voie enfin l’adoption d’un traité ambitieux